URSSAF et Procédures Collectives : Comment réagir à une assignation en redressement ou liquidation judiciaire ?

Perrine Athon-Perez • 30 septembre 2025

Lorsqu’un travailleur indépendant ou une entreprise ne règle plus ses cotisations sociales, l’URSSAF peut engager une procédure de recouvrement. Si la situation financière du cotisant semble irrémédiablement compromise, l’organisme peut aller plus loin et saisir le tribunal compétent en sollicitant l’ouverture d’une procédure collective. L’assignation en redressement ou liquidation judiciaire est alors un signal d’alerte critique.

Cet article vous éclaire sur vos droits, les obligations de l’URSSAF, et les stratégies possibles à adopter.


1. Qu’est-ce que le redressement ou la liquidation judiciaire ?

Le redressement judiciaire est une procédure collective destinée à permettre la poursuite de l’activité d’une entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif, lorsqu’elle est en cessation des paiements mais que le redressement est encore envisageable.

L’article L631-1 du Code de commerce dispose que la procédure de redressement judiciaire est ouverte à tout débiteur qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements.

Lorsque le redressement est manifestement impossible, la loi prévoit une procédure de liquidation judiciaire, qui vise à mettre fin à l’activité et à vendre les actifs pour désintéresser les créanciers. Cette situation est régie par l’article L640-1 du Code de commerce.

Ces deux procédures relèvent du droit des entreprises en difficulté et visent, selon les cas, à organiser le sauvetage de l’entreprise via un plan de redressement ou à procéder à sa liquidation ordonnée.


2. Les créanciers peuvent assigner en procédure collective

Lorsqu’une entreprise ou un indépendant ne règle pas ses dettes sociales (cotisations ou majorations de retard), l’URSSAF peut saisir le tribunal pour demander l’ouverture d’une procédure collective.

Cette faculté est prévue aux articles L631-5 (redressement judiciaire) et L640-5 (liquidation judiciaire) du Code de commerce.

Le créancier agit par voie d’assignation, délivrée par un commissaire de justice (anciennement huissier). Il doit établir que sa créance est certaine, liquide et exigible, et que le débiteur est en cessation des paiements.

Le tribunal saisi fixe ensuite une audience rapidement, au cours de laquelle il statue sur l’ouverture ou non de la procédure. Aucun délai légal précis n’est fixé par les textes, mais la procédure doit se dérouler avec célérité.


3. L’URSSAF est-elle tenue à des diligences préalables ?

Même si le Code de commerce ne l’impose pas expressément, la pratique et la jurisprudence considèrent que le créancier doit avoir tenté au préalable de recouvrer sa créance à l’amiable ou par voie d’exécution forcée, notamment par mise en demeure (souvent requise par le Code de la sécurité sociale – article L244-2), ou par tentative de saisie.

Si l’URSSAF engage une procédure collective sans avoir effectué ces diligences, le débiteur peut contester l’irrégularité de l’assignation devant le tribunal.


4. Réagir efficacement à une assignation URSSAF

Contester l’assignation

Il est possible de contester la validité de l’assignation notamment si :

  • Vous n’êtes pas en cessation des paiements ;
  • L’URSSAF n’a pas respecté les conditions de procédure (absence de mise en demeure, vice de signification…) ;
  • Un plan de paiement est en cours, ou il existe une contestation sérieuse de la créance.

Une défense solide suppose un argumentaire juridique et des justificatifs économiques : trésorerie, échéancier, attestations comptables, etc.

Prendre les devants : déclaration de cessation des paiements

Si la cessation des paiements est réelle, vous pouvez anticiper en déclarant vous-même cette situation au greffe. Cela permet de choisir la date de la procédure, de demander l’ouverture d’un redressement judiciaire plutôt qu’une liquidation, et de démontrer votre bonne foi.


5. La représentation par avocat

La représentation par avocat peut être obligatoire en fonction du montant du litige (notamment au-delà de 10 000 €).

Un avocat vous accompagnera pour :

  • Contester la procédure et soulever d’éventuels vices de forme ;
  • Construire une défense solide et argumentée ;
  • Négocier avec l’URSSAF ou proposer un plan d’apurement ;
  • Anticiper les conséquences sur votre activité et votre patrimoine personnel.


En résumé

L’URSSAF peut assigner un débiteur en procédure collective si elle démontre l’état de cessation des paiements.

Le créancier agit par voie d’assignation, sans qu’un délai légal d’audience ne soit fixé dans les textes.

L’absence de mise en demeure ou d’exécution préalable peut permettre de contester la procédure.

Il est possible de reprendre la main en déclarant soi-même la cessation des paiements.

L’assistance d’un avocat est vivement recommandée, voire obligatoire selon le tribunal.


Besoin d’accompagnement ?

Si vous êtes assigné(e) par l’URSSAF ou confronté(e) à une difficulté financière, ne restez pas isolé(e). La procédure collective est une étape sérieuse, mais elle peut aussi être une opportunité de rebond si elle est bien maîtrisée.

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Dans la vie de l’entreprise ou du travailleur indépendant, il est fréquent de devoir fournir à ses clients une attestation de vigilance. En principe, celui-ci est obligé de la demander à son prestataire lors de la conclusion du contrat puis tous les 6 mois jusqu’à la fin de son exécution. On rappellera, à toutes fins utiles que cette obligation s’impose pour tout contrat d’un montant minimum de 5 000 €HT qui porte sur l’exécution d’un travail, la fourniture d’une prestation de services ou l’accomplissement d’un acte de commerce (contrats de production, de fabrication, de transformation, de réparation, de construction, de fourniture, de vente, de travaux agricoles, de prestations de services, matérielles, intellectuelles ou artistiques, de transport, de sous-traitance industrielle ou de travaux). On le sait, lorsque l’entreprise (ou le travailleur indépendant) est en litige avec l’URSSAF, il est fréquent qu’elle (il) se voit opposer par la Caisse un refus de délivrer une attestation de vigilance . Or cette situation n’est pas toujours normale . Trop d’entrepreneur l’ignorent mais le code de la sécurité sociale prévoit que l’URSSAF est tenue de délivrer l’attestation, même lorsqu’il y a un arriéré de cotisations non payées, dès lors que l’entreprise (ou le travailleur indépendant) en conteste le montant par recours contentieux. En somme, lorsque l’intéressé a porté son litige devant une juridiction, l’URSSAF n’a pas le droit de lui refuser la délivrance de l’attestation. Attention , il faut quand même prendre en compte deux points : Pour que l’attestation puisse être délivrée en cas d’impayé de cotisations, il faut que l’ensemble des cotisations impayées fasse l’objet d’un recours, et pas seulement une partie. Par ailleurs, lorsque l’entreprise (ou le travailleur indépendant) a fait l’objet d’une verbalisation pour travail dissimulé transmise au procureur de la République, l’attestation ne peut être délivrée tant qu’elle (il) n’a pas payé les cotisations et contributions dues suite au chiffrage résultant de la verbalisation pour travail dissimulé. Conseils : En cas de refus d’attestation de vigilance, il est vivement recommandé de demander au préalable à l’URSSAF le motif de ce refus. Il est en effet rarement donné d’emblée. Si l’URSSAF ne défère pas à cette demande de motivation ou s’il s’avère que le refus est motivé par des cotisations impayées discutées devant un tribunal judiciaire, il est possible de contester la décision de l’URSSAF en formulant un recours écrit qui peut être envoyé par lettre recommandé avec accusé de réception et/ou via l’espace en ligne de l’URSSAF. Enfin si l’URSSAF persiste à refuser de délivrer l’attestation, le recours peut être porté devant le tribunal judiciaire en ajoutant éventuellement une demande de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du refus illégal. Attention, avant de saisir le Tribunal, il peut être utile de prendre conseil auprès d’un avocat pour vérifier les chances de succès de l’action et les modalités du montage du dossier. Droit applicable : Articles L243-15 du code de la sécurité sociale
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Si un huissier vous a signifié une contrainte délivrée par l’URSSAF ou par un organisme social, vous devez réagir très vite. En effet, en cas de contestation de la somme réclamée dans la contrainte, vous disposez d’un délai de 15 jours pour faire le nécessaire. Dans ce délai, vous devrez : - Vérifier si la somme réclamée est fondée et suffisamment expliquée par la caisse. - Vérifier si, préalablement à la contrainte, l’URSSAF ou l’organisme de sécurité sociale vous a adressé une mise en demeure. - Vérifier si les cotisations réclamées ne sont pas prescrites. Si, vous décelez une ou plusieurs anomalies (d’après la liste énumérée ci-avant), vous avez tout intérêt à former une opposition à la contrainte. Cette démarche consiste à saisir le pôle social du tribunal judiciaire dont vous dépendez (en principe il est indiqué sur le courrier que l’huissier vous a remis) d’un acte de contestation de la contrainte. Une fois saisi, le recouvrement de la dette est suspendu jusqu’au jugement que rendra le tribunal judiciaire. Attention : l’opposition à contrainte doit être motivée sinon elle est irrecevable. Également, il faut bien penser à joindre une copie de l’acte remis par l’huissier. Conseils : o Il est vivement recommandé de former opposition à contrainte via une lettre recommandée avec accusé réception et d’en conserver une copie. Si l’huissier venait à poursuivre l’opération de recouvrement (via une saisie sur vos comptes par exemple), il vous faudra prouver que vous avez saisi le tribunal pour suspendre ses actions. o Une procédure devant le pôle social du tribunal judiciaire peut durer plusieurs mois voire plusieurs années. Dans certains cas, il peut être utile de tenter de régulariser la situation avec l’URSSAF en parallèle de la procédure d’opposition à contrainte afin de faire avancer la situation plus rapidement. o Une contrainte délivrée par l’URSSAF s’inscrit souvent dans une situation de conflit plus large avec l’organisme. Les délais de prescription en matière de recouvrement de cotisations sociales sont facilement prorogeables et des sommes, mêmes très anciennes, peuvent peut-être encore vous être réclamées. Afin d’éviter d’aggraver la situation, par les majorations de retard notamment, il est vraiment préférable d’opter pour une stratégie d’assainissement en procédant à un examen global de celle-ci. Plus vous repoussez les échéances, moins vous avez de chances, à terme, d’obtenir des remises de pénalités ou des délais de paiement si nécessaire. Droit applicable : Articles L244-9 et suivants du code de la sécurité sociale Articles R133-3 et suivants du code de la sécurité sociale Cour de cassation, chambre civile 1, 28 septembre 2016, N° de pourvoi: 14-29776
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